Mona Bismarck

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Mona Bismarck (1897-1983) fut une figure phare du gotha mondain. Célèbre pour sa beauté et son élégance, elle était une clientèle fidèle de Cartier.

Margaret Edmona Travis Strader – dite Mona – naît en 1897 à Louisville, dans le Kentucky. Fille d’un employé d’élevage de chevaux, elle grandit dans un cadre familial très modeste, déchiré par le divorce de ses parents. Elle ne s’émancipera de son milieu d’origine que par ses mariages successifs, qui lui procureront fortune et reconnaissance sociale.

En 1917, Mona épouse Henry J. Schlesinger, riche homme d’affaires de Milwaukee. Ils ont ensemble un fils, Robert Henry. Le couple divorce cependant quelques années plus tard. Mona se remarie alors à James Irving Bush, un banquier de quatorze ans son aîné.

Après deux échecs matrimoniaux, Mona s’installe à New York en 1926 et ouvre une boutique de mode. Elle fait à la même époque la rencontre de Harrison Williams, influent magnat qui passait pour être l’un des hommes les plus fortunés d’Amérique. Lui succombe à son charme, elle à sa stature imposante et à ses goûts d’esthète. Le couple convole à l’été 1926.

La vie de Mona change alors du tout au tout : elle se consacre désormais à un art de vivre conjuguant raffinement et plaisir. Elle partage son temps entre les différentes résidences du couple de New York, Long Island et Capri, qu’elle fait redécorer avec goût et qu’elle embellit de tableaux de maîtres, Goya ou Boucher. D’une rare élégance, la jeune Mrs Williams capte tous les regards lors des soirées mondaines dont elle devient l’invitée incontournable. 

Diana Vreeland, rédactrice en chef du Vogue américain, témoigne qu’elle est « une beauté extraordinaire », alors que Cecil Beaton, qui la photographia à de nombreuses reprises, la décrit comme une « déesse de cristal de roche aux yeux aigue-marine ». Mona fait alors régulièrement la une des magazines, la presse étant autant fascinée par son charme que ses tenues, commandées auprès des grands couturiers parisiens et qui donnent le la de la mode. Elle est d’ailleurs consacrée « femme la mieux habillée du monde » en 1933. Hubert de Givenchy, son couturier favori depuis qu’il a quitté Balenciaga pour ouvrir sa propre maison, affirme que, selon ses instructions, « nous lui réalisons des robes spectaculaires pour que ses bijoux soient mis en valeur ». 

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Passionnée de joaillerie, Mona est une clientèle fidèle de Cartier. Colliers, clips d’oreilles floraux, broche Art déco, bracelet en saphir, émeraude et jade, parure de perles… L’une de ses pièces Cartier les plus majestueuses est probablement le collier en platine, saphir et diamant qu’elle a commandé auprès de Cartier New York en 1927, modifié en 1959, et qui est aujourd’hui conservé à la Smithsonian Institution de Washington. La collection de Mona Bismarck est l’une des plus somptueuses du XXe siècle, avec celle de son amie la duchesse de Windsor. Si ses bijoux témoignent des modes successives, ils confirment aussi un goût tout personnel pour l’art de marier joaillerie et vêtement. 

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Hubert de Givenchy confirme dans ce sens que « le décolleté des robes devait souligner avec précision les splendides parures de rubis et d’émeraudes mais, en revanche, la coupe des vêtements devait s’effacer, laissant l’importance à ces très beaux bijoux ».

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Devenue férue d’antiquités au cours de ses nombreux voyages aux quatre coins du globe, et notamment de porcelaine chinoise, Mona acquiert chez Cartier des objets décoratifs d’inspiration asiatique. On compte ainsi notamment un flacon commandé en 1926, exécuté à partir d’un corail sculpté chinois datant du XIXe siècle rehaussé d’une perle et de diamants, de même que des encriers en porcelaine et un presse-papier décoré d’une figurine en quartz sculpté représentant une chimère.

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Veuve en 1953 suite au décès de Harrison Williams à l’issue d’une longue maladie, Mona épouse quelques années plus tard le comte Édouard Bismarck, petit-fils de l’illustre chancelier allemand. Le couple s’installe à Paris, sur l’île Saint-Louis, dans le splendide hôtel Lambert. Désormais comtesse, Mona s’impose dans la haute société européenne, comme elle avait su conquérir les cercles mondains transatlantiques.

À la mort de son mari, Mona Bismarck se remarie, pour la cinquième et ultime fois, au médecin de ce dernier. Elle divorcera en 1979. Alors octogénaire, elle partage sa vie entre Capri et Paris, où elle décède quatre ans plus tard. Le photographe et chroniqueur mondain Cecil Beaton lui rendit un vibrant hommage : « ses demeures, son mobilier, ses bijoux, son mode de vie… tout tenait du tour de force ».