
Pierre ornementale d’un bleu profond, le lapis-lazuli est l’un des plus anciens matériaux nobles connus, toujours très présent dans la création joaillière.
- Composition chimique : aluminosilicates de sodium et de calcium, contenant du soufre et des ions sulfates
- Transparence : opaque
- Couleur : bleu outremer, pouvant être parsemé de cristaux de pyrite (dorés) et/ou de veines ou de cristaux de calcite ou de dolomite (blancs)
- Dureté : 5,5 sur l’échelle de Mohs
- Provenances principales : Afghanistan, Chili, Russie
Étymologie, histoire et légendes
En latin, lapis désigne la pierre et lazuli dérive d’« azur », du persan lazhward, qui signifie « bleu ».
Dans L’Épopée de Gilgamesh, l’un des premiers livres de l’histoire de l’humanité datant du XVIIIe siècle avant notre ère, Gilgamesh évoque un « arbre de lapis-lazuli [au] feuillage chargé de fruits séduisants… ».
Connu dès le IVe millénaire avant J.-C., le lapis-lazuli orne de nombreux bijoux et objets des époques sumériennes et égyptiennes, comme en témoignent les trésors révélés lors de la découverte du tombeau de Toutânkhamon en 1922. Les pierres bleues de l’Antiquité, désignées sous le nom de « saphirs », étaient en réalité très souvent du lapis-lazuli. À l’époque romaine, il est considéré comme un aphrodisiaque et il est par la suite souvent employé dans la pharmacopée du Moyen Âge.
Durant des siècles, le lapis-lazuli est exploité en Afghanistan et transporté jusqu’à Bagdad, d’où il était négocié puis exporté vers le reste du monde. Cette provenance lointaine vaut à sa nuance bleu profonde le qualificatif d’« outremer », signifiant littéralement « d’au-delà des mers ».
Réduit en pigment, le lapis-lazuli est très apprécié par les artistes du Moyen Âge, qui en ornent les enluminures les plus précieuses, puis plus tard par les peintres de la Renaissance. C’est à ces époques un matériau extrêmement coûteux, plus onéreux que l’or. Le lapis-lazuli est également employé dans la confection de céramiques, verres et émaux. Son utilisation connaît un essor mondial au cours des XIIIe et XIVe siècles, qui perdurera jusqu’à l’époque industrielle, pendant laquelle il sera détrôné par le pigment de synthèse.
Élevé au rang de pierre nationale, le lapis-lazuli chilien, surnommé la « fleur des Andes », du nom de la mine et de la société qui l’exploite, a été découvert (ou peut-être redécouvert) au milieu du XIXe siècle.
Lapis-lazuli célèbres
De très nombreux objets témoignent de l’utilisation du lapis-lazuli dans l’art liturgique et dans la création d’objets ornementaux pour les cours royales du monde entier. Citons par exemple un collier pectoral égyptien représentant un vautour orné de lapis-lazuli, retrouvé dans le tombeau de Toutânkhamon et destiné à le protéger dans sa vie terrestre et dans l’au-delà.
Couleur et utilisation
Les pierres les plus appréciées sont celles qui présentent un aspect homogène. Elles ne comportent que peu ou pas de matière autre que la lazurite. Évoquant un ciel étoilé, le lapis-lazuli parsemé de petits points dorés de pyrite est également recherché.

Formation
Le lapis-lazuli est une roche, c’est-à-dire un agrégat de minéraux, composée en totalité ou en partie de lazurite. La présence minoritaire d’autres éléments est fréquente. La dolomite ou la calcite créent par exemple des zones ou des veines de couleur blanchâtre. La pyrite lui confère des petites touches jaunes à l’éclat métallique.
Gisements
Le lapis-lazuli est connu et exploité au nord-est de l’Afghanistan depuis plus de 6 000 ans. Il s’agit d’une zone d’accès difficile, aux parois escarpées, située à 2 500 mètres d’altitude. Elle est réputée pour la qualité inégalée des roches qui y en sont extraites, notamment depuis les années 1970. Les formations géologiques afghanes se prolongent au nord, dans le Tadjikistan limitrophe, mais la qualité des pierres y est moindre.
Considérée comme l’un des acteurs majeurs du secteur du luxe, la Maison Cartier s’engage à garantir l’approvisionnement responsable des pierres magnifiées au sein de ses créations. De ce fait, elle a pris la décision en octobre 2018 de ne plus se fournir en lapis-lazuli en provenance d’Afghanistan.
Découvert au milieu du XIXe siècle, le lapis-lazuli du Chili est exploité à 3 600 mètres d’altitude dans la cordillère des Andes, à la frontière argentine. Sa structure veinée favorise une utilisation décorative. Seuls les rares éléments dépourvus de calcite pourraient être comparés au lapis-lazuli afghan.
Il existe également du lapis-lazuli en Sibérie (Russie), au Canada, en Californie et même en Italie.
Certification et origine
Le lapis-lazuli ne donne pas lieu à certification.
Conseils d’entretien
Le lapis-lazuli nécessite d’être manipulé avec soin pour éviter rayure et égrisures. Il ne supporte ni rhodiage, ni ultrasons, ni produit chimique, ni trop grande chaleur.


Cartier et le lapis-lazuli
Le lapis-lazuli occupe une place à part parmi toutes les pierres employées par Cartier. Matière de prédilection des arts décoratifs et joailliers depuis des millénaires, la Maison y recourt tôt, dès l’époque de sa fondation, comme l’illustre un bracelet à médaillons en lapis-lazuli ornés de fleurs de lys en diamant, créé vers 1850.
Des décennies plus tard, autour de 1910, Louis Cartier encourage les dessinateurs à l’intégrer dans des pièces d’inspiration égyptienne : nécessaires agrémentés des figurines de divinités, accessoires décorés de hiéroglyphes ou de lotus, pendule portique… Le lapis-lazuli est souvent associé au corail, à la cornaline et à la turquoise, dans une évocation fidèle des objets d’apparats qui entouraient autrefois les pharaons.
Outre sa charge historique, Louis Cartier apprécie le lapis-lazuli pour l’intensité de sa couleur. Déployant son goût pour les expérimentations chromatiques, il imagine des créations graphiques et fortes en contrastes, consacrant d’inédites associations de matières. Saphir et émeraude, corail et onyx, lapis-lazuli et jade… autant d’alliances audacieuses qui annoncent – déjà – l’Art déco.


Dans les années 1930 et d’après-guerre, la Maison poursuit ses recherches chromatiques, en renouvelant sensiblement les déclinaisons de couleurs proposées en joaillerie. Dans un article de 1935, le journaliste S.R. Nalys note que « le bijou [est traité] comme une composition décorative, comme un “ensemble” dans lequel les couleurs rutilent, appelant les oppositions les plus inattendues non seulement des saphirs, des émeraudes, des turquoises… mais encore celles des jades, du corail, du lapis ». Directrice de la création de Cartier à partir de 1933 et jusqu’en 1970, Jeanne Toussaint sublime le lapis-lazuli pour des pièces puissantes en or jaune ou, plus nuancées, en l’associant à la turquoise pour jouer des variations de bleu.

Jamais absent des ateliers de la Maison, comme en témoignent nombre d’accessoires et de bijoux au fil des décennies, le lapis-lazuli est régulièrement mis à l’honneur dans les créations contemporaines. Citons par exemple un ingénieux bracelet recto verso de Haute Joaillerie réalisé en 2017, une pendule évoquant un ciel étoilé présentée la même année, ainsi que des bijoux de la collection Cactus de Cartier.

