
Éphémère roi Edward VIII, le duc de Windsor (1894-1972) a marqué l’histoire par le couple qu’il formait avec Wallis Simpson : c’est par amour pour elle qu’il renonça, en 1937, à la couronne britannique. Il devint alors une figure mondaine réputée pour son élégance et grand client de Cartier.
Le prince charmant
Né en 1894, Edward est le fils aîné de la princesse Mary de Teck, de la Maison de Wurtemberg, et du prince George, duc d’York. Ce dernier, à la mort du roi Edward VII en 1910, monte sur le trône britannique sous le nom de règne de George V. L’année suivante, Edward est intronisé prince de Galles : il est désormais l’héritier de la couronne.
Edward conserve un souvenir tendre de son enfance, notamment des célébrations réunissant la famille royale. Il confie ainsi dans ses mémoires, avec un certain sens du romanesque, que les fêtes de Noël lui évoquaient « du Dickens dans une monture de chez Cartier ».
Devenu jeune homme, il est régulièrement amené à représenter son père, notamment lors de visites officielles aux quatre coins de l’Empire britannique. Hors protocole, le prince goûte aux plaisirs d’une vie de célibataire, multipliant aussi bien les festivités que les conquêtes. Sa prestance ne laisse pas insensible : en témoigne un dessin du caricaturiste français Sem, qui représente « le prince charmant » entrant dans la boutique parisienne de Cartier sous les cris de joie d’une foule exclusivement féminine, dont l’exaltation est contenue avec peine par un policier.

En 1931, Edward rencontre Wallis Simpson. Il tombe immédiatement sous son charme et la revoit de manière toujours plus régulière au cours des mois suivants. Leur relation devient évidente vers 1934, au grand dam du roi George V. Wallis en est à son deuxième mariage, or il est inconcevable pour les mœurs de l’époque que le futur monarque britannique, empereur et chef de l’Église anglicane, fréquente une femme divorcée.
Edward tient tête à son père. Pour exprimer son affection à Wallis, il lui offre des bijoux, acquis pour la plupart auprès de Cartier, joaillier officiel du prince depuis l’attribution d’un brevet de fournisseur en 1921. En témoignent des croix latines en platine ou serties de pierres fines voire précieuses, gravées au revers d’inscriptions personnelles, ou encore une broche de 1935 figurant un W en saphir et un E en rubis – initiales respectives de Wallis et Edward qui, entrelacées, forment le mot we signifiant « nous » en anglais.

D’Edward VIII à duc de Windsor
Le roi George V décède en janvier 1936. Désormais monarque, Edward, huitième du nom, est confronté à l’inéluctable : choisir entre le trône et la femme qu’il aime. Moins d’un an après avoir accédé au pouvoir, il abdique en faveur de son frère.
Edward, désormais duc de Windsor, rejoint Wallis en France. Tout juste divorcée pour la seconde fois, celle-ci accepte de l’épouser en décembre 1936. Pour bague de fiançailles, le duc lui offre un anneau surmonté d’une émeraude, réalisé par Cartier. Le mariage est célébré en juin 1937 et Wallis devient duchesse de Windsor.
Un manifeste d’élégance
Ne remplissant que peu de fonctions officielles, les Windsor s’emploient surtout à mener une existence mondaine consacrée à l’art de vivre et à l’élégance.
Le couple acquiert plusieurs propriétés d’exception – notamment à Paris et au cap d’Antibes –, qu’ils décorent de leurs collections d’objets précieux, disposés sur du mobilier d’époque. Un aménagement intérieur caractéristique de ce que l’on nomme depuis le « goût Windsor ».

Dans le domaine vestimentaire, le duc fait preuve d’un même raffinement. Il porte inlassablement des costumes croisés confectionnés par les meilleurs tailleurs londoniens, appairés à des cravates au nœud épais, qui portent depuis son nom. À l’annulaire gauche, le duc arbore deux bagues trois anneaux trois ors de Cartier, comme le faisait le poète Jean Cocteau. Le joaillier parisien a aussi sa faveur pour les accessoires. Grand fumeur, il a toujours à portée de main un étui à cigarettes. Il tient particulièrement à celui en or, créé par Cartier, que lui a offert Wallis pour Noël en 1935. Une pièce exclusive retraçant l’itinéraire de leurs voyages sur le fond d’une carte d’Europe gravée. Les capitales visitées sont serties d’une pierre et reliées entre elles par un fil d’émail. Le duc possède également une pince à billets en or commandée auprès de la Maison en 1937. Elle est décorée des initiales w et e ajourées – un motif indissociable des Windsor.


Une collection exceptionnelle
Le couple demeure inséparable jusqu’à la mort du duc, survenue en 1972. Wallis s’éteint quatorze ans plus tard.
En 1987, est organisée la vente des bijoux de la duchesse, offerts pour la plupart par le duc et dont les pièces les plus exceptionnelles furent réalisées par Cartier. La presse, enthousiaste, évoque alors « the most important jewellery collection put together in the 20th century » (la plus importante collection de bijoux jamais réunie au XXe siècle).
