
Les archives constituent une source unique sur l’histoire et les créations de la Maison depuis ses origines.
Liés au développement de Cartier à l’international, avec l’ouverture d’une filiale en Angleterre en 1902 et aux États-Unis en 1909, les trois départements d’archives témoignent aujourd’hui de la production locale des Maisons de Paris, Londres et New York. Plusieurs types de documents y sont soigneusement conservés.

Pour commencer, les dessins. Des croquis et esquisses initiales aux dessins d’exécution, les archives détiennent un fonds graphique d’une extrême richesse. Les créations sont traditionnellement dessinées sur papier-calque et gouachées, un tracé au crayon graphite soulignant les détails. La pièce y est toujours représentée à l’échelle 1, condition incontournable, car c’est sur la base du dessin qu’œuvrent ensuite les artisans pour donner vie au bijou.
Le fonds permet parfois de remonter plus loin, jusqu’à la source de l’inspiration. La Maison a en effet conservé les carnets tenus par Louis Cartier et ses dessinateurs dans lesquels étaient consignés les idées, croquis et notes des créatifs. Ces livrets portent les noms évocateurs de « Cahier d’idées » ou « Idées nouvelles ».
Ils permettent aujourd’hui de comprendre le processus créatif de l’époque. On y trouve par exemple des références au musée Guimet, que les dessinateurs fréquentaient régulièrement, mais également à certains livres qui leur servaient de source d’inspiration. Louis Cartier avait en effet fait l’acquisition d’une collection importante d’ouvrages relatifs à l’histoire de l’art et de l’architecture, qu’il mettait à disposition de ses dessinateurs pour alimenter leur créativité et les ouvrir aux différentes civilisations, anciennes ou lointaines. Cette bibliothèque est encore aujourd’hui conservée par la Maison.
La photographie arrive dès 1901 chez Cartier. Un photographe, employé par la Maison, avait déjà la responsabilité de documenter la production dès que les bijoux sortaient des ateliers. Si seules les pièces les plus importantes étaient au départ sélectionnées, la photographie se systématise à partir de 1907. Comme pour les dessins, le rapport 1 demeure la règle d’or pour immortaliser les créations avec le plus de justesse. Au-delà de la richesse de ces visuels, qui permettent de comprendre le style de la Maison, la collection de négatifs apporte un important témoignage de l’évolution des techniques photographiques. Les archives parisiennes ont ainsi préservé près de 40 000 négatifs sur plaque de verre au gélatino-bromure d’argent, ainsi qu’une très belle collection d’autochromes Lumière, ancêtres de la photographie couleur qui se systématise dans les années 80 avec un large fonds d’Ektachromes.
Pour les créations les plus anciennes, un moulage en plâtre venait parfois compléter la photographie. Ces empreintes étaient prises sur les bijoux finis et les restituaient dans l’intégrité de leur volume. Conservés rue de la Paix, ils s’appréhendent comme des joyaux bruts, dénués de leurs matières précieuses ; un témoignage presque archéologique de bijoux qui pour certains n’existent plus, car démontés ou disparus.


Les archives conservent enfin les écritures comptables du joaillier. Registres de stock et de commandes, journal des ventes, comptes clients… chaque pièce réalisée par le passé y est individuellement décrite avec précision, de sa fabrication jusqu’à sa commercialisation. Les registres permettent ainsi de connaître la date exacte de création, correspondant à la date de livraison par les ateliers, d’obtenir un descriptif précis et surtout un décompte détaillé des composants. Ils documentent également la vente. C’est notamment parce qu’elles conservent des informations de vente relatives à ses clients que ces archives sont confidentielles et ne sont aucunement ouvertes au public. Seuls les documents liés à la création sont consultés en interne par les designers et pour l’expertise des pièces anciennes qui peuvent réapparaître dans les maisons de vente aux enchères. À l’instar du catalogue raisonné des œuvres d’un artiste, les archives permettent ainsi non seulement l’authentification des créations Cartier mais garantissent également leur valeur sur le marché de l’art.

