
À l’origine simple accessoire utilitaire, l’écrin joaillier, entre les mains de Cartier, est devenu un objet de désir à part entière. Immédiatement reconnaissable, la fameuse boîte rouge aux frises dorées possède un tel pouvoir d’évocation qu’elle compte parmi les codes emblématiques de la Maison.

« Je suis arrivé à bon port malgré mes 105 écrins. C’était un peu risqué. » Introduction d’une lettre du vendeur Paul Cheyrouze, en voyage pour la Maison à Madrid en 1909.
Vecteur d’émotion, l’écrin est un objet courant dans l’univers de la joaillerie. Grâce à un design qui s’est précisé avec le temps, celui de Cartier est devenu un véritable emblème, au point de figurer de façon régulière au sein des campagnes de communication de la Maison ; de tenir le premier rôle en couverture ou au sein d’éditoriaux de magazines prestigieux ; d’inspirer une collection de maroquinerie, Guirlande de Cartier, en 2018.
Les caractéristiques de l’écrin Cartier
L’écrin de la Maison a connu bien des visages avant d’adopter un coloris rouge, ses frises dorées et une forme le plus souvent carrée à pans coupés.

La couleur
Historiquement, la palette de couleurs de l’écrin Cartier est large : vert sombre ou olive, rouge dans des nuances multiples allant jusqu’aux vieux rose, marron, noir et même bleu… Tous ces coloris ont cohabité jusqu’à ce que le rouge s’impose peu à peu, probablement entre 1920 et 1930, élevant cette teinte au rang de signature de la Maison.
La forme
Un carré à pans coupés, voilà la forme emblématique de l’écrin Cartier. Néanmoins, une grande diversité de formats a toujours existé puisque le gabarit des coffrets dépend des pièces renfermées. Certains écrins sont par ailleurs réalisés sur mesure pour les créations les plus exceptionnelles : un boîtier incurvé pour un diadème ; un autre muni de portes pour une pendulette de voyage.

Au plus près des pièces conservées, les écrins se révèlent parfois étonnamment petits – lorsqu’ils renferment une pince à cravate ou une épingle à chapeau par exemple – ou étonnants tout court, lorsqu’ils épousent la forme d’un porte-cigarette, d’une paire de lorgnettes d’opéra… voire d’une réplique miniature du module qui s’est posé sur la Lune en 1969, au cours de la mission historique Apollo 11.



Les frises dorées
Les Archives de la Maison conservent la trace de divers styles de marquage décorant les coffrets. La guirlande florale toujours employée aujourd’hui pour embellir la partie supérieure de l’écrin est, elle, apparue dès le début du XXe siècle. Inspirée des codes esthétiques du XVIIIe siècle, elle témoigne du goût de Louis Cartier pour le style néo-classique – une préférence qui donnera naissance au style guirlande. En 1938, son dessin en forme d’arceaux, jusqu’alors changeant, est officiellement fixé et adopte la silhouette plus stylisée qu’on lui connaît aujourd’hui.
Deux autres types de frise soulignent les contours de la boîte actuelle : un premier aux motifs abstraits et un second composé de petits pointillés dorés, évoquant de précieuses surpiqûres.

Les coloris intérieurs
Les intérieurs des écrins Cartier étaient traditionnellement recouverts d’étoffes soyeuses, blanches ou dans des tons beige à crème. Le tissu côté couvercle différait parfois de celui du fond de la boîte, associant ainsi soie et velours – dans des teintes claires mais aussi foncées : bleu, noir, marron, etc. De plus en plus employés ces vingt dernières années, les intérieurs complètement noirs ont fini par s’imposer au sein des coffrets de Haute Joaillerie.

Les blasons
L’écrin ouvert dévoile un marquage côté couvercle. Depuis plus d’un siècle, ce motif témoigne des différentes adresses de Cartier : il y a d’abord eu « 9 Bd [boulevard] des Italiens Cartier Joaillier-Orfèvre », puis à partir de 1899 « Cartier Paris Rue de la Paix ». En 1902 apparaît « Cartier Paris London » et la nouvelle adresse. Dès 1909, c’est la filiale new-yorkaise qui s’affiche avec « Cartier Paris London New-York », l’adresse de chacune des boutiques étant détaillée. Plus anecdotique, un marquage « Caracas » a été découvert sur des écrins américains datant probablement des années 1950.
Aujourd’hui, les écrins arborent soit le logo Cartier soit la mention « Paris Londres New York » (ou « Paris London New York » à l’anglaise). Cette inscription rappelle les points d’ancrage originels de la Maison, soulignant ainsi la dimension historique de son rayonnement international.
L’écrin Cartier, un acteur à part entière
La couleur rouge de l’écrin Cartier ne laisse pas indifférent. En plus de symboliser la passion amoureuse dans de nombreuses cultures, elle revêt une dimension théâtrale qui sied bien au cérémonial associé à l’offre d’un cadeau précieux. On pense immédiatement à l’émotion d’Elizabeth Taylor, rayonnante sous le soleil de Saint-Jean-Cap-Ferrat à l’été 1957, recevant des mains de son mari Mike Todd une parure Cartier dans son écrin. Un moment très cinématographique, immortalisé par une vidéo.
Immédiatement reconnaissable, le coffret Cartier est en réalité rapidement devenu un acteur à part entière – y compris au cinéma. À son actif, il compte ainsi plusieurs apparitions remarquées : dans le film de Billy Wilder Certains l’aiment chaud par exemple, avec Marilyn Monroe et Tony Curtis (1959) ; dans Comment voler un million de dollars de William Wyler, avec Audrey Hepburn et Peter O’Toole (1966) ; dans Two Lovers de James Gray, avec Joaquin Phoenix et Gwyneth Paltrow (2008) ; dans Mon Roi de Maïwenn, avec Emmanuelle Bercot et Vincent Cassel (2015), ou encore dans Ocean’s 8 de Gary Ross, avec Sandra Bullock, Cate Blanchett, Anne Hathaway, Rihanna et Helena Bonham Carter (2018).

